rilpoint_mw113

Le Contrat Social de Rousseau

Version du 24 janvier 2010 à 16:39 par Amb (Discuter | Contributions)

Sommaire

Le Contrat Social. Jean Jacques Rousseau.

Liste des Extraits étudiés:

Chapitre 1 :

Chapitre III : Du droit du plus fort.

Chapitre IV : De l’esclavage. « Renoncer à sa liberté, c’est renoncer à sa qualité d’homme … n’a aucun sens. »

Chapitre VI : Du pacte social.

Chapitre VII : Fin du chapitre sur la nécessaire obéissance à la loi « Chaque individu

peut comme homme avoir une volonté particulière contraire …abus »

Chapitre VIII. De l’état civil.

LIVRE II

Chapitre III : Si la volonté générale peut errer.

Jusqu’à : « l’avis qui l’emporte n’est qu’un avis particulier »

LIVRE III

Chapitre IV : De la démocratie.

LIVRE IV :

Chapitre VIII : De la religion civile. Extrait : «  Il y a donc une profession de foi purement civile … les cultes que nous avons exclus. »




Contrat Social : Livre I Chapitre 1

Rousseau annonce son projet et le plan de sa démarche ;

« L’homme est né libre et partout, il est dans les fers »

« L’homme est né libre » reprend la thèse du 2ème discours. (D. sur l’Origine et les Fondements de l’Inégalité entre les hommes)

En décrivant l’état de nature, Rousseau a montré que les hommes y jouissent d’une liberté d’indépendance.

L’homme y est pensé sans relation avec Dieu.

Et nul homme n’a par nature une autorité sur un autre homme. Nul ne naît pour être maître, nul ne naît pour être esclave. Chacun a seul autorité sur soi même.

« Partout il est dans les fers » : renvoie à l’analyse du fait, de la réalité historique. Dans son époque Rousseau découvre des lois inégalitaires instaurant la domination des uns sur les autres.

Il ne faut pas imaginer que les « maîtres » sont libres. Quand des rapports de violence existent entre les hommes, le maître a besoin de son esclave pour sa subsistance, il a besoin aussi de s’assurer de la fidélité de ceux qui lui sont soumis. Moralement, il est prisonnier de ses propres passions.

S’il n’y avait pas de droit, il n’y aurait entre les hommes que des rapports de force ; le problème politique serait simple : obéir quand on ne peut pas faire autrement et « secouer le joug » quand on peut renverser le rapport de force.

Mais Rousseau veut se placer dans l’ordre du droit : qu’est-ce qui fonde un pouvoir politique, qu’est ce qui le rend légitime et l’autorise à donner des ordres ?


Rousseau annonce le plan de sa démarche :

Sur quoi se fonde le droit ? (qu’est ce qui autorise un pouvoir politique à donner des ordres et à se faire obéir ? )

« Ce droit ne vient pas de nature » puisque nous l’avons vu plus haut rien ne fonde dans la nature un homme à se faire obéir d’un autre homme.

« Il est donc fondé sur des conventions » Les hommes n’ayant à se plier à aucune puissance naturelle, leur obéissance ne peut résulter que de leurs propres engagements. Il faut que par un accord, un contrat, les hommes délèguent à un pouvoir politique l’autorité que chacun d’entre eux a par nature sur soi même.

« Il s’agit de savoir quelles sont ces conventions »

Il faudra choisir entre les conventions possibles : tous les contrats ne sont pas acceptables.


______________________________________________________________________________

Dans la suite de la démarche nous verrons :

I Rousseau refuse de prendre la nature comme fondement du droit .

- Livre I Chapitre II ; Il n’y a pas d’autorité naturelle d’un homme sur son semblable : refus

de l’idée de l’esclavage naturel.

- Livre I chapitre III : La force ne fonde pas le droit.

II Le pouvoir politique légitime repose donc sur une convention : -Livre I Chapitre IV : de l’esclavage. (Il s’agit du pacte d’esclavage ) Il ne suffit pas qu’un pouvoir repose sur un pacte pour être légitime : il y a de mauvais pactes

- Livre I chapitre VI : du pacte social. Rousseau décrit le pacte républicain.



Contrat Social Livre I - Chapitre IV De l'esclavage.

(Il s’agit du pacte d’esclavage ).

Si les hommes ne peuvent être liés à une autorité par la nature, ou bien par la force, seuls leurs propres engagements peuvent les lier.

« Puisqu’ aucun homme n’a une autorité naturelle ….parmi les hommes. »

¤ Rousseau veut cependant montrer que certains pactes sont irrecevables, certains engagements sont nuls et non avenus.

Un homme ne peut se dépouiller de sa liberté. La liberté est inaliénable. Sinon cela n’aurait pas de sens de dire que l’homme naît libre, cela signifie que sa liberté n’appartient qu’à lui.

La critique s’adresse à Hobbes et à la conception du pacte social développé dans le Léviathan.

Grotius est un juriste hollandais qui admet le pacte d’esclavage. Il passe de l’esclavage privé admis à Rome et par la loi juive ( un homme peut se vendre à un autre pour sa subsistance ) à l’idée qu’un peuple peut se vendre. Quand un peuple n’a plus de quoi subsister, il peut se vendre à un chef. Le chef procure la nourriture par la guerre ou le pillage, ou parce qu’il est suffisamment riche.

Rousseau conteste ce contrat parce qu’il n’y a pas de vraie réciprocité. Le peuple donne tout, mais il n’est pas sûr d’obtenir quelque chose en échange, c’est plutôt lui qui risque d’avoir à subvenir aux besoins du roi.

« Dire qu’un homme se donne gratuitement, c’est dire une chose absurde et inconcevable … »

Le propre de la liberté c’est d’appartenir à celui qui la possède et à lui seul. Un père ne peut donc disposer de la liberté de ses enfants. Rousseau veut soustraire l’enfant aux servitudes familiales.


« Renoncer à sa liberté, c’est renoncer à sa qualité d’homme » La liberté comprend des droits et des devoirs (puisqu’elle a un sens moral). Renoncer à tout cela, c’est renoncer à ce qui fait le prix de l’humanité. il n’y a pas de compensation possible à ce qui est donné. Une convention suppose deux parties dont chacune apporte et reçoit quelque chose. Il n’y a pas de convention où tous les sacrifices sont d’un seul côté.

Chez Hobbes, les hommes, pour sortir de l’état de nature qui est un état de guerre perpétuelle s’unissent et remettent tous leurs droits naturels entre les mains d’un prince.

Le contrat a lieu entre chacun des hommes et tout le reste. Tous s’engagent à se dépouiller de tous leurs droits. Le souverain lui ne s’engage à rien. Son rôle est d’assurer la paix civile.

On fonde encore l’esclavage sur une autre sorte de pacte : l’esclavage est censé pouvoir naître du droit de la guerre.

Le vainqueur aurait un droit de vie ou de mort sur le vaincu et lui donnerait donc la vie contre son esclavage.

Rousseau réfute cela en disant qu’il n’y a jamais de guerre d’homme à homme. La guerre est une relation d’état à état. Il s’oppose donc à Hobbes qui parle de guerre naturelle de chacun contre tous. La guerre n’a pu naître qu’avec la naissance des états. la guerre a pour seul objet de détruire l’état ennemi et non ses membres.

Quand un combattant pose les armes, il redevient simplement un homme et nul n’a plus le droit de vie ou de mort sur lui.




Contrat Social - Livre I - Chapitre VI - Du Pacte Social

Résumé de ce qui précède .

Au chapitre V, Rousseau a évoqué la première convention par laquelle un peuple se constitue comme peuple .

Il pense qu’avant tout choix d’une forme de gouvernement (monarchie , aristocratie), le souverain doit se constituer .

Avant de se donner par exemple un roi, les membres d’un état doivent d’abord s’être constitués en état, il faut qu’ils créent une puissance publique que Rousseau appelle « le souverain »

Pour lui la cession de leurs libertés par des particuliers à un chef ( comme le conçoit Hobbes) ne fait pas encore un peuple . Il ne pense pas qu’un peuple puisse naître d’un rapport d’autorité entre un homme et une multitude .

On suppose donc la naissance fictive d’une société . Il n’y a jamais eu, dans l'histoire, de passage entre un état de nature et une société .

« Trouver une forme d’association qui défende et protège de toute la force commune, la personne et les biens de chaque associé, et par laquelle chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui même et reste aussi libre qu’auparavant. » (Contrat Social)


BUT : Qu’attend –on de l’état ou du pouvoir politique ? La sécurité des personnes et des biens et liberté .

« Défendre la personne et les biens » (Remarque pas de condamnation de la propriété)

On pourrait obtenir la sécurité dans un état fort , en se soumettant à un rapport de force. Cf Hobbes Le Léviathan

Mais peut- on légitimer l’abdication de sa liberté ? Peut-on légitimement consentir à se soumettre à un autre homme ? Rousseau affirme qu’on ne peut demander à un homme d’aliéner sa liberté : (rappel de ce qui précède)

Demander à un homme d’aliéner sa liberté, ce serait lui demander de faire une convention qui tourne toute à son désavantage.

« Je fais avec toi une convention toute à ta charge et toute à mon profit que j’observerai tant qu’il me plaira et que tu observeras tant qu’il me plaira » (‘Contrat Social Livre I chapitre IV)

L’état doit être une association d’homme libres et non une association d’esclaves soumis à un maître.

Le pacte social légitime ne peut être un pacte de soumission. Ici Rousseau s’oppose à Hobbes qui admet que pour trouver la sécurité et la paix civile les hommes peuvent se soumettre tous à un prince disposant de l’autorité absolue. "Que chacun s’unissant à tous n’obéisse pourtant qu’à lui même et reste aussi libre qu’auparavant »

Le pacte social doit garantir la liberté .

Le pacte social doit empêcher qu’un associé puisse en soumettre un autre à sa volonté. Dans l’état de nature, la garantie de la liberté, c’est l’absence de relations sociales, dans la société, c’est l’autorité du souverain sur tous ses membres. Il faut libérer le citoyen d’une servitude particulière.

Le pacte doit faire en sorte que chacun demeure « aussi libre qu’auparavant » c’est à dire jouisse d’une liberté sous la loi qui compense l’abandon de sa liberté naturelle. (le « auparavant » renvoie à un état de nature , à une situation – fictive - où la relation politique n’existe pas) . Il faut que chaque membre du corps politique soit préservé d’une relation de dépendance personnelle.

( que « chacun n’obéisse qu’à soi même ») . C’est en obéissant à la loi qu’on sera préservé d’obéir à un autre homme, mais évidemment, il faut que la loi remplisse certaines conditions pour qu’il y ait liberté d’autonomie ..

Les clauses d’un Contrat permettant de remplir ces conditions sont universelles et nécessaires , elle sont posées par la raison telle qu’elle est chez tous les hommes . Elles n’ont peut être jamais été «  formellement énoncées ».

On ne peut se référer à un événement historique. Il s’agit d’une réflexion sur ce que doit être le Contrat à la base d’une société juste, non violente. C’est un Contrat « tacite », non exprimé réellement.



MOYENS : Les clauses du Contrat :

Une clause = c’est une disposition d’un acte juridique.

«  L’aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté »

Il peut être curieux de constater que le chemin de la liberté passe par l’aliénation de tous les droits .

Dans la théorie de Hobbes l’aliénation est aussi totale. (Spinoza pense qu’on ne peut aliéner sa liberté de penser , sa liberté religieuse ) mais chez Hobbes chacun s’engage vis à vis de tous les autres à ne plus exercer son droit naturel ,( à se défendre soi même par exemple) ; chacun s’engage vis à vis de chacun , la communauté n’apparaît pas . Le souverain seul demeure libre et profite de l’abstention de tous les autres. La loi désormais, c’est la volonté du prince , il n’y a pas d’autre droit que celui dont il décide . Il dit le juste et l’injuste.

Chez Rousseau chacun abandonne ses « droits » , il faut plutôt dire sa liberté naturelle , à se conserver par exemple . Et cet abandon est fait en faveur de toute la communauté, pas d’un autre homme.

Chacun s’en dépouille également, pour qu’il n’y ait pas de privilèges, et pas de rapports de dépendance. « La condition est égale pour tous » l’égalité est une condition de la liberté. Si la condition n’était pas égale pour tous, les plus forts , les )plus indépendants pourraient réduire les autres sous leur dépendance .

L’union sera d’autant plus parfaite que personne n’aura rien gardé de ses droits naturels.

Chacun reçoit en échange des droits civils, c’est à dire des droits garantis par la loi : propriété de ses biens, liberté civile . C’est la loi qui lui confère ces droits là. Le juste et l’injuste sont maintenant définis par la loi.

On se donne à une collectivité et non pas à un particulier. « Chacun se donnant à tous ne se donne à personne »

On obéit à un être impersonnel ; et cette collectivité va mieux garantir les droits qu’elle me donnera que je ne pouvais moi même garantir mes droit par ma simple force .

«  Chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale »

Chacun promet d’obéir à la loi. On peut être libre en obéissant. Il faut donc comprendre comment l’obéissance à la loi, peut garantir à chacun une forme de liberté. L’obéissance à la loi préserve d’obéir à un autre homme . Le citoyen, libéré d’une servitude particulière n’est pas non plus écrasé par le joug de la communauté ?

Cette loi garantie de la liberté n’est pas quelconque. Elle est volonté générale. « Sous la suprême direction de la volonté générale »

Qu’est ce que la volonté générale ? Elle vise au bien commun. Elle va donc dans le sens de l’intérêt véritable de chacun à la différence de ce que Rousseau appelle la « volonté de tous » qui n’est qu’une somme d’intérêts particuliers.

Dégager la volonté générale est possible, si un intérêt commun unit les citoyens. Elle n’est pas sacrifice de soi, mais dérive de l’amour de soi . « Faire le bien pour le bien, c’est le faire pour soi, dans son propre intérêt »

C’est une règle de justice que le citoyen conscient des conditions de vie en société accepte pour son bien, sa sécurité personnelle et la sauvegarde de sa liberté. En obéissant à la volonté générale, je travaille au bien commun en même temps qu’à mon propre bien.

Si la loi ne représente qu’une somme d’intérêts particuliers, au lieu de viser le bien commun, des rapports de dépendance demeurent. On peut se retrouver soumis aux intérêts des autres : la loi n’exprimerait que la défense des intérêts de quelques uns .(par ex en termes modernes des intérêts économiques d’une minorité)

Précisons ce qu’est une loi : rappel .

« C’est une déclaration de la volonté générale sur un objet d’intérêt commun »

« C’est quand tout le peuple statue sur tout le peuple ».

La loi doit émaner de tout le peuple et ne jamais statuer sur un cas particulier. ((Par exemple si la loi dit qu’il y aura des privilèges, elle ne dit pas quel particulier doit en jouir). Statuer sur un cas particulier c’est appliquer la loi, c’est un acte de magistrature.

L’indépendance, au sens de « faire ce qui me plait » n’est pas pour Rousseau la vraie liberté. C’est une liberté précaire qui n’a pas de consistance.

« On a beau vouloir confondre l'indépendance et la liberté, ces deux choses sont si différentes que même elles s'excluent mutuellement. Quand chacun fait ce qu'il lui plaît, on fait souvent ce qui déplaît à d'autres, et cela ne s'appelle pas un état libre. La liberté consiste moins à faire sa volonté qu'à n'être pas soumis à celle d'autrui; elle consiste encore à ne pas soumettre la volonté d'autrui à la nôtre. Quiconque est maître ne peut être libre, et régner c'est obéir. » Lettres écrites de la Montagne.

L’acte d’association produit une « République » . Le mot signifie «  chose publique » parce qu l’intérêt commun y est préservé .

Le souverain, dans l’usage courant, c’est une personne, le roi, l’empereur. Rousseau entend par là ceux qui ont le pouvoir de faire les lois et qui exercent ce pouvoir. le souverain est actif.

L’état, c’est le peuple, en tant qu’il observe les lois, c’est l’ensemble des hommes soumis aux mêmes lois, qui sont donc passifs.

Le citoyen, est le membre du corps politique en tant qu’il est actif, il fait la loi.

Chaque citoyen obéit aussi à la loi, en tant qu’il obéit, il est « sujet » soumis à la loi. Mais on n’est jamais seulement sujet dans une république, toujours en même temps citoyen et sujet.

-

-

-